Virer capot est un droit

À chaque fois qu’un député de l’Assemblée nationale ou de la Chambre des communes change d’allégeance partisane, le débat reprend de plus belle. Le parti qui perd ce député ne manque pas de qualificatif pour le désigner: traitre, opportuniste, agit par manque de convictions. S’en suit un concert de demande de démission, le parti affaibli de la perte d’un député exige que celui-ci démissionne afin de déclencher une élection partielle; il alimente le cynisme des citoyens selon eux. Mais est-ce vraiment les transfuges qui alimentent tant le cynisme des citoyens?

Que dire d’un député d’arrière-banc d’un parti au pouvoir. Celui-ci s’est fait élire quelques années plus tôt, très bien intentionné et plutôt idéaliste, pensant réellement que la prise de pouvoir du parti qu’il représentait aux élections allait changer le cours des choses au pays.  Il est amèrement déçu. La très grande majorité des promesses qui ont été faites n’ont jamais été réalisées et son gouvernement s’engouffre dans les scandales de corruption et de collusion. Pire encore, il fait exactement l’inverse de ce qui a été promi durant la campagne électorale. Son parti bat des records d’impopularité. Le simple député se sent trahi. Il a des convictions, et ce sont ces mêmes convictions qui l’ont poussés à se présenter quelques années auparavant.

Par contre, il ne veut pas quitter la politique, il croit qu’il peut encore changer les choses. Doit-il démissionner de son parti et se tenir debout pour ses convictions, ou rester et agir comme un simple robot qui vomit le message de la direction du parti? Nous sommes dans un pays démocratique et en tant que citoyen, le député doit avoir le droit de pouvoir changer d’allégeance partisane, que vous soyez d’accord avec les raisons ou non. Les gens du comtés qui sont mécontents de ce changement pourront s’exprimer au prochain scrutin général, pas besoin de déclencher une partielle pour ça.

Autre chose, j’en ai assez des députés des autres partis faussement outrés de ces changements d’allégeances. Le Parti québécois, par exemple, s’insurge du fait que François Rebello et autres ont quittés le Titanic péquiste pour rejoindre la CAQ ou fonder un autre parti, l’Option Nationale. Par contre, ne se rappellent-ils pas que le Parti québécois lui-même est la création d’un transfuge, René Lévesque? Lorsque René Lévesque a quitté le Parti libéral pour fonder le PQ, a-t-il démissionné de ses fonctions? Ce n’est pas cette même Pauline Marois, qui lors de la démission d’Éric Caire et de Marc Picard, était prête à les reçevoir à bras ouvert, qui aujourd’hui s’insurge de voir ses députés la quitter? Le NPD qui exige la démission de Mme St-Denis n’est-il pas le même parti qui a accueilli le transfuge conservateur québécois Robert Toupin dans les années 80? A-t-il démissionné et mit son siège en jeu?

Je ne dis pas que tout les transfuges ont raison de quitter leurs partis respectifs. Certains le font par pur opportunisme et pour des raisons nébuleuses. Mais dans certaines autres circonstances, c’est pleinement justifié de vouloir changer de parti politique.

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